samedi 9 mai 2015

WOULD YOU BELIEVE (1968)

Le coup de coeur

(1968)



Le White Album, Odessey & Oracle, The Village Green Preservation Society, S.F Sorrow, Present Tense, The Smoke, Aerial Ballet, Beggars Banquet, Give Me Take You ou encore The Further Adventures of Charles Westover... Que peuvent bien avoir en commun tous ces albums ?

Vous ne devinez pas ?

Déjà, ils sont merveilleux, il faut le noter, mais qui plus est, le hasard ou la coïncidence a voulu qu'ils paraissent tous la même année : c'est à dire en l'an de grâce 1968. Que de splendeurs pour une seule année serait on alors tenter de penser. Cela est certes vrai, et la litanie se révèle d'autant plus étourdissante lorsque l'on sait que tous ces trésors ne représentent encore que la partie immergée de l'iceberg, et que toute une ribambelle de disques aux charmes indéniables et variés reposent encore dans les profondeurs, seulement célébrés par une poignée d'initiés ici et là, des ardents prosélytes, brûlant de convertir les foules païennes à l'objet de leur culte. Et c'est précisément dans cette catégorie que l'on peut trouver notre jeune ami Billy Nicholls et son "Would You Believe", dont je m'offre d'être le prosélyte enfiévré sur ce site de type communautaire.

Tout commence avec George Harrisson. En 1966, ce dernier fait la rencontre d'un jeune blondinet tout juste âgé de 16 ans, le genre prodige : Billy Nicholls, qui lui présente quelques unes de ses démos. Georgie se montre alors enthousiaste et même impressionné. Il décide de le présenter à Andrew Loog Oldham, le manager des Stones, qui s'était justement mis en quête d'un jeune freluquet talentueux avec l'espoir d'en faire la nouvelle star psyché, et aussi l'ambition de dégainer une réponse britannique au "Pet Sounds" des garçons de plage. Ainsi débute la collaboration entre les deux hommes ; le projet "Would You Believe" est mis à flot. Des pointures sont même dégotées pour enregistrer la galette : Steve Marriott, Nicky Hopkins et John Paul Jones sont notamment de la partie. Les sessions s’avèrent productives, si bien que douze chansons d'un psychédélisme baroque splendides sont prêtes à aller enrichir le répertoire déjà éblouissant des sixties.

Sauf que l'album ne paraîtra jamais. Du moins pas avant 1999, soit plus de trente piges plus tard. La faute à un cruel manque de fonds du label Immediate Records pour financer le pressage et la promotion de cette collection de titres pourtant fantastique. Seuls une dizaine d'exemplaires seront distribués aux radios et DJ, qui aujourd'hui encore valent une petite fortune en dollars.

Pendant trente ans donc, le disque maudit fut escorté par une réputation plus qu'élogieuse, d'autant plus alléchante que peu de personnes se trouvait en mesure de se forger une véritable opinion de la chose ; le vinyle tant convoité demeurant quasi introuvable. La légende enfla comme une bauduche jusqu'à la fin du siècle dernier, où l'occasion fut saisie d'en proposer une ré-édition (tout simplement une première édition en fait). Les amateurs purent alors constater avec joie que la rumeur ne mentait pas, et profitèrent de l'occasion pour s'ébaubir tout leur saoul devant cette pochette conjuguant habilement la déformation photographique de Rubber Soul et les couleurs de Pet Sounds. "Would You Believe" était bien le chef d'oeuvre tant vanté durant toutes ces années. Et s'il n'atteint pas la grâce miraculeuse d'un "Odessey & Oracle" par exemple, il n'en demeure pas moins un savant mélange de ce qui se faisait de mieux en matière de pop des deux côtés de l'Atlantique, ainsi qu'un passage obligé pour tous les adorateurs sachant apprécier les délices du psychédélisme baroque en gourmet.

Bien qu'à peine majeur, Billy y fait déjà l'étalage de toute son aisance vocale et de tout son talent mélodique. Sa voix d'angelot se meut avec délicatesse entre les envolées enchanteresses des chœurs et les harmonies solaires baignant tout l'album, donnant à l'ensemble une impression de grande légèreté en dépit de tout l'apparat et de tout le faste mise en oeuvre par Oldham dans sa production. Les graciles clavecins s'en donnent à coeur joie, les cordes cascadent avec inspiration sur quasiment tous les morceaux que comprend l'album. Les ritournelles lumineuses s’enchaînent très agréablement, donnant la sensation d'avoir à faire au Sagittarius de Curt Boettcher auquel on aurait appliqué le fameux Mersey Beat. Aucune chanson ne dépareille, l'hybridation américano-britannique fonctionne à merveille : les Beach Boys (Daytime Girl) y cotoient les Kinks (Question Mark) qui envoyent des pokes à Sagittarius (Life Is Short, Feeling Easy) qui demandent Syd Barrett en ami (London Social Degree, autrement dit LSD), le tout s'accomplissant sous le regard bienveillant et approbateur des Beatles.

Et alors qu'il aurait pu consteller le firmament pop de l'année 68 d'une nouvelle étoile avec cette brillante galette, Billy Nicholls s'en retournera pourtant anonyme, occupant la suite de sa carrière à composer des chansons pour d'autres artistes, parmi lesquels on peut notamment compter Del Shannon, Roger Daltrey ou encore Phil Collins. Il publiera également par la suite une poignée d'albums qui rencontreront tous l’insuccès commercial, malgré quelques bons moments, comme ce "Love Songs" de 1974, qui contient quelques petites pépites acoustiques n'ayant rien à envier à leurs éclatantes aînées.


Ecoute intégrale.



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