Par le bris d'une goutte peut être. Cette première note tombée du ciel s'écrasant. Ploc ! A la suite de laquelle s'engouffrent quelques secondes de rien, ou plutôt de silence. Une onde se répand alors, et l'on attend, comme suspendus... Ensuite retentit la basse, sombre et molle, puis la goutte à nouveau, plus vive, PLIC !!! Puis une charmante note de violon fulgure, allègre et facétieuse, presque furtive, de suite coupée par une basse preste... puis silence de nouveau... quelques secondes... basse, moins sombre la basse, puis basse moins basse, les cordes se mettent à gambader alentour, des pizzicatos, les gouttes pleuvent désormais, ça s'accélère, ça s'illumine de partout à la fois, les notes se répondent, jouent entre elles, tourbillonnent, vivantes et virevoltantes, une mélodie s'en dégage peu à peu... La musique s'écoule gentiment, voilà, ça commence comme ça Apple Venus, avec "River Of Orchids" qui enfle, s’éveille et sort de son lit. Au bout d'un moment une trompette fait une intervention, cérémoniale et volontaire comme elle sait bien l'être des fois... Alors Andy Partridge entame ses incantations sur cette rivière féconde. Il y croit ça s'entend Andy. Il le sait que ça va être beau. Alors on se laisse emporter par le courant, ravis et surpris par cette entame aussi audacieuse...
J'ai mis plusieurs écoutes avant de me rendre compte de la perfection de ce titre. Pas une perfection universelle qui s'imposerait à tout le reste, non, mais une petite perfection personnelle, un petit cosmos intérieur qui fait que si vous changez une seule note, retranchez une seule idée à l'ensemble, la chanson s'en trouverait irrémédiablement appauvrie, car tout est à sa bonne place. Les bonnes notes et les bonnes idées interviennent au bon moment. Rien ne manque et rien n'est superflu. La perfection.
C'est une formule que l'on pourrait d'ailleurs étendre à l'album dans sa globalité, tant celui-ci révèle des trésors d'inventivité et de sophistication. La qualité des compositions, la fraîcheur des mélodies, l'élégance des voix y sont toujours magnifiées par une production amoureusement léchée. Du vrai travail d’orfèvre, avec une infinie précision et un amour du détail qui laisse pantois. Cet album a de la race à n'en pas douter. Ecoutez donc "Easter Theatre" pour vous en convaincre : ce mellotron langoureux, ce délicieux déluge de cordes, ces ponctuations de cuivres, n'est-ce pas du raffinement ? N'est-ce pas de la gloire ? D'autres se seraient vautrés immanquablement dans la lourdeur, se seraient casser les dents sur la surenchère d'effets et de moyens, mais pas nos deux démiurges britons, non. Ils balayent l'écueil d'un revers de corde, sereins. Tout est propice à la légèreté dans Apple Venus, tout se révèle divinement aérien, lumineux, extatique. Pas de doute, les Beatles rôdent dans les parages, ces idoles vénérées par les deux têtes pensantes formant XTC, Andy Partridge et Colin Moulding, qui ne manquent d'ailleurs pas l'occasion de leur consacrer deux hommages aussi appuyés que réussis en passant ("Fruit Nut" et "Frivolous Tonight", ou encore "Knights In Shining Karma", qui utilise le même motif d’arpèges que"Dear Prudence" et "Julia").
On pourrait citer tous les titres tellement la qualité et l'inspiration déborde de ce disque : du modèle d'inventivité et de songwriting que représente "Your Dictionary" à la magnificence de "I Can't Own Her" (ces 20 premières secondes, coeur coeur coeur) en passant par le rythme agréablement galopant de "I'd Like That", tout est ronron, tout est rayon, tout est soleilbrille.
Mais comme les meilleures choses ont une fin dit-on, que rien ne dure, la mélancolique "Harvest Festival" vient devancer l'élégiaque "The Last Balloon" pour un final claveciné de toute beauté. La pesanteur disparaît. Il est alors temps de quitter ce monde, miracle de bon gout et d'harmonie, pour un temps. Le rivière rentre dans son lit sur un tempo lent. C'est fini. C'était beau.
1999. On aurait su rêver meilleure clôture pop pour le millénaire agonisant. Apple Venus vol.1 représente probablement l'acmé pop de XTC, et à coup sûr l'un des plus beaux fleurons du genre toutes époques confondues.
Que dire de plus ? Donnez lui sa chance.
Ecoutez-le, plusieurs fois.
Vous ne le regretterez pas.
Album intégral
C'est une formule que l'on pourrait d'ailleurs étendre à l'album dans sa globalité, tant celui-ci révèle des trésors d'inventivité et de sophistication. La qualité des compositions, la fraîcheur des mélodies, l'élégance des voix y sont toujours magnifiées par une production amoureusement léchée. Du vrai travail d’orfèvre, avec une infinie précision et un amour du détail qui laisse pantois. Cet album a de la race à n'en pas douter. Ecoutez donc "Easter Theatre" pour vous en convaincre : ce mellotron langoureux, ce délicieux déluge de cordes, ces ponctuations de cuivres, n'est-ce pas du raffinement ? N'est-ce pas de la gloire ? D'autres se seraient vautrés immanquablement dans la lourdeur, se seraient casser les dents sur la surenchère d'effets et de moyens, mais pas nos deux démiurges britons, non. Ils balayent l'écueil d'un revers de corde, sereins. Tout est propice à la légèreté dans Apple Venus, tout se révèle divinement aérien, lumineux, extatique. Pas de doute, les Beatles rôdent dans les parages, ces idoles vénérées par les deux têtes pensantes formant XTC, Andy Partridge et Colin Moulding, qui ne manquent d'ailleurs pas l'occasion de leur consacrer deux hommages aussi appuyés que réussis en passant ("Fruit Nut" et "Frivolous Tonight", ou encore "Knights In Shining Karma", qui utilise le même motif d’arpèges que"Dear Prudence" et "Julia").
On pourrait citer tous les titres tellement la qualité et l'inspiration déborde de ce disque : du modèle d'inventivité et de songwriting que représente "Your Dictionary" à la magnificence de "I Can't Own Her" (ces 20 premières secondes, coeur coeur coeur) en passant par le rythme agréablement galopant de "I'd Like That", tout est ronron, tout est rayon, tout est soleilbrille.
Mais comme les meilleures choses ont une fin dit-on, que rien ne dure, la mélancolique "Harvest Festival" vient devancer l'élégiaque "The Last Balloon" pour un final claveciné de toute beauté. La pesanteur disparaît. Il est alors temps de quitter ce monde, miracle de bon gout et d'harmonie, pour un temps. Le rivière rentre dans son lit sur un tempo lent. C'est fini. C'était beau.
1999. On aurait su rêver meilleure clôture pop pour le millénaire agonisant. Apple Venus vol.1 représente probablement l'acmé pop de XTC, et à coup sûr l'un des plus beaux fleurons du genre toutes époques confondues.
Que dire de plus ? Donnez lui sa chance.
Ecoutez-le, plusieurs fois.
Vous ne le regretterez pas.
Album intégral
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